Extraits pertinents :

[1]  À l’occasion de l’interrogatoire avant défense de Guy Tremblay, le 25 avril 2013, les défendeurs réclament l’obtention des dossiers médicaux et psychologiques du demandeur, pour la période antérieure à l’événement discuté du 17 décembre 2011.

[2] Les demandeurs s’y objectent, alléguant que ces dossiers ne sont pas pertinents au litige et que leur communication porterait atteinte au droit au respect de la vie privée de monsieur Tremblay.

I –        LES FAITS

[3] Dans le cadre du souper de Noël de l’employeur de sa conjointe, le demandeur participe avec cette dernière à un repas de type « meurtre et mystère », dans un restaurant de Baie St-Paul.

[4] Cinq comédiens, dont le défendeur Michel Nadeau, jouent le scénario entendu, dont la finale mène monsieur Nadeau à asséner un coup de poêlon à la tête de Guy Tremblay, acteur de la pièce sans l’avoir su.

[5] Il semble que le coup porté au demandeur l’ait été avec une force plus grande que prévu, au point où monsieur Tremblay allègue, à sa requête, avoir subi des dommages considérables des suites de ce coup, dommages qui l’auraient empêché d’exécuter son travail de camionneur pour une longue période de temps.

[6] Interrogé avant défense le 25 avril 2013 sur sa réclamation de 92 000 $ – qu’il amendera le 29 mai suivant pour la porter à 302 665 $ – le demandeur rapporte deux événements passés de sa vie, ce qui provoque la demande de communication de ses dossiers médicaux antérieurs :

a)      à l’âge de 17 ans, vers 1986, il a subi un accident de motocross, qui lui causa des dommages à la tête;

b)      en 2006, il a fait une dépression à la suite du décès de son père, ce qui l’affecta pour une période d’environ trois mois.

[8] Les défendeurs réclament la communication de l’intégralité des dossiers médicaux et psychologiques du demandeur à compter des deux événements antérieurs : on comprend qu’ils désirent s’assurer qu’aucun malaise, traitement ou diagnostic de l’époque n’ait été classé ou catalogué ailleurs ou autrement que comme une conséquence directe de l’un ou l’autre de ces événements.

II –      L’ANALYSE

  1. Les autorités

[10] La décision faisant autorité en la matière est l’arrêt Glegg[2], là où le juge LeBel signale – dans deux paragraphes différents – les intérêts à préserver pour la demande et pour la défense :

Si la Cour d’appel admet que l’institution de procédures en responsabilité médicale peut impliquer une renonciation implicite au secret, celle-ci demeure limitée par le principe de la pertinence. Si le droit à la défense doit être protégé, il importe aussi de sauvegarder le droit à la protection de la vie privée que soulève la relation psychiatrique. […][3]

[…]

La Cour d’appel a souligné l’importance du secret professionnel médical. Elle a rappelé à bon droit l’importance du droit au respect de la vie privée qu’implique la relation psychiatrique. Cependant, si important qu’il soit, ce secret ne représente pas un absolu. Malgré la protection que lui accordent notamment la Charte québécoise et les lois d’organisation professionnelle, il connaît des limites. La divulgation d’informations confidentielles peut être imposée pour protéger des intérêts concurrents. […][4]

[11] Le juge LeBel précise que le critère de la pertinence joue un rôle central dans l’exercice, rôle qu’il décrit ainsi[5] :

[…] Il doit ici prendre en compte l’importance du droit au respect de la vie privée, déjà protégé par la Charte québécoise, qu’implique la reconnaissance législative du secret professionnel médical. Il oblige celui qui réclame l’accès à l’information à établir la pertinence apparente de l’information recherchée, pour l’exploration des fondements de la demande et pour la conduite de la défense. […]

[21] Bien sûr, les tribunaux ne sont pas disposés à autoriser des parties de pêche de la part des défendeurs : dans le présent cas, ce sont les événements passés de la vie du demandeur, ainsi que le grand éventail des problèmes allégués par lui, qui font que ce sont les demandeurs eux-mêmes qui invitent – malgré eux – la défense à une telle expédition.

[22] Dans les circonstances, il faut à tout le moins laisser aux défendeurs l’opportunité de contrôler eux-mêmes les portions de dossiers médicaux qui pourraient être éventuellement liées aux problèmes actuellement vécus par monsieur Tremblay.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[23] REJETTE l’objection des demandeurs;


Dernière modification : le 2 décembre 2017 à 15 h 43 min.