Extraits pertinents : [1] Paulo Grilo demande au Tribunal de prononcer contre son ex-voisin Gilles Hachey, une injonction permanente lui ordonnant de cesser de l'importuner, de le harceler, de l'insulter et de l'intimider. [2] Il demande également de le condamner à lui payer, à titre de dommages-intérêts, une somme de 86 493,10 $. [10] En avril 1999, monsieur Grilo vient demeurer au […], à Longueuil et il devient ainsi le voisin immédiat de monsieur Hachey qui habite sur la même rue au 363. [58] Les deux parties ont par ailleurs soutenu que le fait d'avoir été photographiées ou filmées sur leur propriété constitue une atteinte à la vie privée. [59] Elles ont raison. L'article 5 de la Charte des droits et libertés de la personne, L.R.Q., c. C-12 (la Charte), mentionne que «[t]oute personne a droit au respect de sa vie privée». Les articles 35 et 36 C.c.Q. sont au même effet. [60] La preuve démontre qu'au cours des ans, les parties ont systématiquement surveillé leurs faits et gestes, ce qui a d'ailleurs alimenté leur conflit. Ce comportement a constitué ici une atteinte à la vie privée. [61] Notamment, le fait pour monsieur Grilo d'avoir filmé monsieur Hachey et ses proches sur sa propriété, allant jusqu'à capter ce qu'il déchargeait du coffre de son véhicule, a dépassé ce qui aurait été requis pour appuyer ses prétentions dans le contexte d'un débat judiciaire. [62] De même, l'installation par monsieur Hachey d'une caméra permanente laissant croire à monsieur Grilo qu'il était filmé de manière continue, constitue un geste inapproprié. Que la caméra n'ait pas été opérationnelle ou qu'elle n'ait pas été dirigée vers la propriété de monsieur Grilo, comme le prétend monsieur Hachey, ne constitue pas une justification, dans les circonstances. Monsieur Grilo et ses proches se croyaient épiés et tout indiquait qu'ils l'étaient. [70] Les dommages-intérêts de 85 000 $ réclamés ici par les parties pour atteinte à la vie privée et à l'intégrité, à titre de dommages moraux, pour souffrance, troubles et inconvénients, pour nuisance ou perte de jouissance de propriété et dommages punitifs, ne s'appuient sur aucune preuve matérielle. [72] Même si dans leur témoignage les parties se sont renvoyé les blâmes, le Tribunal estime que chacune d'elles a non seulement porté atteinte aux droits de l'autre, mais également qu'elle a eu, dans une large mesure, le comportement répréhensible qui leur est reproché par l'autre. [75] Aussi, considérant l'ensemble de la preuve, le Tribunal est d'avis que monsieur Hachey doit verser à monsieur Grilo, pour l'indemniser du préjudice que lui a causé son comportement, une somme de 5 000 $ et que monsieur Hachey doit lui verser, à la même fin, une somme de 2 000 $. [76] Relativement à l'octroi de dommages punitifs, l'article 1621 C.c.Q. indique qu'ils peuvent être accordés lorsqu'une loi en prévoit l'attribution et qu'ils «ne peuvent excéder, en valeur, ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive». Il précise qu'ils s'apprécient en tenant compte de toutes les circonstances. [77] Le droit à la vie privée, on l'a déjà mentionné, est protégé par l'article 5 de la Charte et le droit à l'intégrité de sa personne est en outre protégé par l'article 1 de la Charte. L'article 49 de la Charte mentionne qu'«[u]ne atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente Charte confère à la victime le droit d'obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte». «En cas d'atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut en outre condamner son auteur à des dommages-intérêts punitifs.» [78] En l'espèce l'une et l'autre des parties ont, à des degrés divers, de façon intentionnelle porté atteinte à des droits reconnus par la Charte, soit le droit à la vie privée et le droit à l'intégrité de la personne. [79] Considérant la gravité des fautes de l'une et l'autre, de la période au cours de laquelle elles ont été commises et de la fonction préventive visée par le législateur, le Tribunal condamnera monsieur Grilo à verser à monsieur Hachey une somme de 1 000 $ à titre de dommages punitifs et condamnera monsieur Hachey à lui verser au même titre une somme de 3 000 $. POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL: RELATIVEMENT AUX DOMMAGES-INTÉRÊTS AUTRES QUE PUNITIFS: [108] DÉCLARE QUE monsieur Grilo a droit à des dommages-intérêts de 5 000 $ pour l'indemniser du préjudice que lui a causé le comportement de monsieur Hachey, et de 600 $ pour abus de procédure de la part de ce dernier; [109] DÉCLARE QUE monsieur Hachey a droit à des dommages-intérêts de 2 000 $ pour l'indemniser du préjudice que lui a causé le comportement de monsieur Grilo; [110] OPÉRANT COMPENSATION, DÉCLARE QUE monsieur Hachey doit verser à monsieur Grilo, la somme de 3 600 $; [111] CONDAMNE monsieur Hachey à verser à monsieur Grilo, une somme de 3 600 $, avec intérêts au taux légal depuis l'assignation, plus l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 C.c.Q.; [112] AVEC DÉPENS. Dernière modification : le 29 novembre 2017 à 11 h 32 min.